Je lis pas mal de choses à ce sujet, notamment du côté québécois. Lors d’un récent voyage, j’ai lu et relu un excellent ouvrage sur la question du changement en éducation écrit par Marc-André Girard : Le changement en milieu scolaire québécois, c’est possible. Bien évidemment, tout ce qui y est décrit est intégralement transposable au système français (très conservateur) car comme dirait ma blonde: » Où il y a de l’homme, il y a de l’hommerie »
Le changement en milieu scolaire québécois permet de démystifier plusieurs comportements, attitudes et situations liés au changement dans le monde de l’éducation en se référant à différents modèles issus de la philosophie, des sports, en passant par diverses théories scientifiques. Pour ceux qui croient que le changement est souvent difficile, voire impossible, l’auteur démontre le contraire et propose différents moyens d’introduire le changement dans son école en étant des agents positifs du changement.
En parallèle, je lis régulièrement les articles de Jacques Cool, dont celui-ci consacré au changement. L’image qu’il utilise résume assez bien la situation dans tous les milieux professionnels mais particulièrement en éducation. Je pense même reconnaître quelques visages 🙂
Dans notre établissement, nous avons un plan numérique 1:1 depuis 3 ans avec des tablettes. J’ai donc été très intéressé par cet article de Marc-André Girard (encore lui!) paru dans le Huffington Post Québec : Les tablettes électroniques en classe ou les espoirs d’un remède miraculeux.
J’en viens (enfin) à mon point: Avoir des élèves en classe avec une tablette sur le bureau, bein ça change pas mal de choses dans la vie quotidienne de tout le monde: gestion de classe bien différente, organisation spatiale de la classe repensée (le rang d’oignons ne favorise pas trop le développement de l’oignon en question), rôle et posture du prof (si vous restez confortablement installé dans votre posture naturelle, sous-entendu à parler trop devant le tableau, vous allez vous en faire passer des vertes et des pas mûres), type de travaux demandés (podcasts, vidéos, tutoriels, corrigés d’exercices, …) , responsabiliser les élèves à des usages citoyens mais aussi académiques de l’internet, développement du sens critique, et cæteri, et cætera…
Cette année encore, nous avons eu l’éternelle question de la mort qui tue, à savoir : Est-ce que la tablette électronique a une incidence sur le rendement des élèves ? (cf titre article précédent)
Pour y répondre, nous avons invité deux chercheurs universitaires à venir nous voir en classe et à analyser nos pratiques, Catherine Lanaris (UQO) et Thierry Karsenti (UDM). Ces deux chercheurs ont fait des recherches très différentes. Catherine a réalisé des entrevues de classes et de longues entrevues individuelles (les 3 enseignants et une dizaine d’élèves) alors que Thierry réalisait un sondage élèves et un sondage parents, dans le cadre d’une recherche beaucoup plus large avec plusieurs écoles et plusieurs milliers d’élèves.
Ce qui ressort de tout ça, c’est que le quantitatif est bien difficile à mesurer, on aura une idée de cela dans quelques années ALORS QUE le qualitatif est facilement mesurable (intérêt des enfants pour la chose scolaire, gestion des différences d’apprentissage, engagement des élèves dans les projets, nombreuses publications pour être vu des autres (pas seulement du prof qui corrige et annote. Une vidéo d’une de mes élèves dans le cadre du projet » J‘ai une minute pour te persuader de lire ce livre a été vue plus de 11 000 fois sur Youtube en un an, soit à peu près 10 999 fois plus que si elle m’avait remis un travail papier qui serait resté entre elle et moi. Au passage, comme elle ne trouvait pas d’ambiance sonore qui correspondait à ce qu’elle voulait dans Imovie, elle a posé son Ipad sur le piano et enregistré la trame sonore…)
Alors oui, parlons du plaisir d’être en classe! Le prof a plaisir à offrir des activités variées, à se renouveler, à chercher sans cesse de nouvelles choses, bien loin du cahier jauni de préparation utilisé d’année et années. L’élève est en classe mais en contact avec la vraie vie. L’école n’est pas un monde à part, une réserve. Il lit chaque matin un ou plusieurs articles de presse (1 jour / 1 actu ), il commente, il confronte les autres, on discute. L’élève s’implique mieux dans des tâches pour de vrai que dans des tâches dans lesquelles on lui demande de jouer implicitement de jouer le jeu de l’école en faisant plaisir à son prof et à papa/maman.
La plus-value est donc essentiellement qualitative en attendant la mesure du quantitatif. Un prof heureux, motivé, impliqué qui tient compte de la diversité des élèves, de la variété des situations d’apprentissage maintenant possibles dans une classe (son, images annotées, vidéos, …). Le plaisir à l’école, c’est contagieux !
45.483455
-75.694284